Les Lofoten sont des îles absolument époustouflantes. Lorsque le soleil de minuit illumine les sommets, la magie prend littéralement vie. Imaginez un crépuscule permanent où les sommets s’enflamment et se parent de mille nuances. J’avais envie de tout cela ! J’avais envie d’une explosion d’émotions face à la nature. Tu viens ? Je t’emmène pour un bivouac dans les Lofoten sous le soleil de minuit
Les Lofoten sous le soleil de minuit
Les Lofoten, ces îles au Nord du cercle polaire arctique, sont sans aucun doute le plus bel endroit qu’il m’ait été donné de voir sur terre. Elles m’avaient littéralement éblouies en 2016 lors de ma première venue. Ici, dans le cadre de mon projet Varagyan Roadtrip, je voulais profiter des Lofoten sous le soleil de minuit pour vivre une série de microaventures : du packraft dans le Reinefjord, l’ascension du plus haut sommet des Lofoten – l’Hirgravtinden mais aussi vivre un bivouac sous le soleil de minuit.
Le soleil de minuit embrase le ciel d’un million de nuances flamboyantes. Asgard est en flamme, Ragnarök estival !
Le Middnattssol ou soleil de minuit provoque des ambiances et des lumières tout droit sortie de mythes et légendes scandinaves. Dans cette atmosphère onirique créé par ce crépuscule permanent. Un théâtre épique tire le rideau sur un opéra empli de pourpre et de majesté. Vous comprendrez donc ma volonté d’en profiter allant bivouaquer en montagne. Accompagné de Quentin, le Crapahuteur, et d’Aurélie, nous avons réalisé l’ascension du Veinestinden et avons bivouaqué à son sommet.
Ascension du Veinestinden
Le Veinestinden est sans doute le sommet offrant le plus éblouissant panorama sur le Reinefjord et la ville de Reine. Oubliez le Munkan ou le Reinebringen, le Veinestinden est vraiment LE spot pour profiter de toute la grandeur de Moskenesøya, sans doute l’île la plus emblématique des Lofoten. Néanmoins, comme la majorité des sommets, il se mérite. En effet, vous devrez affronter le dénivelé dantesque et les pentes abruptes durant les 5 km d’ascension et 800 D+ avec tout votre matériel de bivouac.
Une rumeur s’élève dans le Fjord. Façonné par les géants, je ressens leur pulsation tellurique à chaque inspiration. Immensité !
À travers la jungle birmane
L’ascension commence au petit parking situé entre Reine et Moskenes juste après le pont enjambant le Djupfjorden. La première partie de la randonnée longe le fjord jusqu’au pied des montagne. Ce passage n’est vraiment pas facile à aborder. En effet, le sentier, à peine marqué, se faufile littéralement entre les arbres. Parsemé de trous, de boue et d’appuis instables, il met déjà les organismes à rude épreuve. Dans ces conditions, nous avançons lentement et les 20kg sur le dos n’arrangent rien.
Cette “jungle birmane” au nord du cercle polaire ne résiste heureusement pas aux affres de la météo scandinave et disparaît bien vite. Ainsi, avec elle, nous abandonnons aussi la seule végétation de notre ascension. Au fond du fjord, nous cherchons le chemin. Ce dernier est à peine visible. Il se faufile secrètement droit dans la pente jusqu’à un magnifique lac lové aux creux des montagnes. Il fait chaud, terriblement chaud. Nous ne résistons pas à la tentation : on plonge dans l’eau glaciale du lac.
Au col
L’ascension continue droit dans la pente. Même en plein été, le sentier peut se révéler glissant tellement il est abrupte. C’est la raison pour laquelle je vous le déconseille fortement par temps de pluie ou par grand vent. En effet, dans ces conditions, il peut alors se révéler extrêmement dangereux. N’oubliez jamais que les Lofoten peuvent être dévastatrices une fois que la météo clémente s’efface au profit de l’impétuosité des éléments.
Après cette dernière difficulté, nous arrivons au col. À gauche dans le lointain, j’aperçois le sommet plat du Veinestinden et à ma droite le célèbre Reinebringen à droite qui culmine à 666m, le chiffre du diable… Les locaux aiment le rappeler et ils ont relativement raison comme je vous l’expliquerai plus tard. Devant nous, la vue sur Reine est déjà à couper le souffle.
Autant de beautés jetées aux yeux des hommes ne peut être que l’oeuvre d’Odin, le premier Skald. Le Reinefjord est un poème, une ode à la terre et à sa beauté absolue !
Jusqu’au sommet
Au col, il ne reste plus que 1km pour atteindre le sommet du Veinestinden. Je vous conseille de longer le précipice afin de profiter du panorama grandiose sur le Reinefjord. Avec la météo clémente qui nous accompagne, les Lofoten apparaissent comme un Eden terrestre. Leur beauté est insolente, presque divine. Comment ne pas être pris aux tripes par de tels paysages !
Lofoten, paradis où l’horizon infini et l’écho des boucliers de jadis se mêlent dans la douceur et l’impétuosité de son climat !
Bivouac dans les Lofoten sous le soleil de minuit
Magie et grandeur
Je n’ai pas de mots pour vous décrire la beauté de ce paysage. Imaginez un théâtre de montagnes déchiquetées émergeant de l’océan et dansant sous une lumière constamment changeante. Nous restâmes de longues minutes silencieux à contempler le spectacle. Le vent nous enveloppa des légendes qui sommeillent dans de tel lieu.
Parfois, le silence est le compagnon le plus cher. En effet, lorsque les mots ne sont pas assez forts pour porter le poids des émotions, il faut les laisser suspendus aux limbes de nos souvenirs.
Bivouac dans les Lofoten
Reprenant nos esprits, nous avons planté nos tentes. Nous étions seuls au sommet avant d’être rejoint par un suédois taciturne, parfaitement en adéquation avec le recueillement sommitale. Malgré une météo au beau fixe, nous devions faire attention aux quelques rafales malmenant la toile de nos tentes. Par précaution, j’ai donc amarré la tente avec un surplus de pierre pour éviter que le vent ne s’y engouffre. En quelques minutes, l’atmosphère rougeoie. Il est temps de manger, de sortir nos petits plats lyophilisés.
Le bivouac dans les Lofoten, comme dans toute la Norvège, est soumis au droit d’accès à la nature. Ce dernier donne à chaque personne le droit de profiter de la nature, d’y vagabonder, de planter sa tente librement, de cueillir des baies, champignons et fleurs sauvages. Cela doit être fait dans le respect du milieu. Malheureusement, dans les Lofoten, le tourisme de masse menace cet accès.
Dès lors, les autorités ont créé un document reprenant les comportements à adopter pour profiter de la nature. N’oubliez jamais que la beauté d’une randonnée, d’un bivouac ou encore d’une sortie en packraft n’est totale que si votre aventure n’a aucun impact sur le milieu. Vous avez un doute ? Faites appel à des professionnels.
Ragnarök crépusculaire
Après avoir mangés, il est temps désormais de profiter du spectacle. Tout simplement. En quelques minutes, l’horizon est passé d’un bleu profond à l’or étincelant. Je m’empêchais presque de cligner des yeux pour ne rien manquer à cette apothéose.
Durant l’été polaire, le soleil s’incline face à l’horizon mais ne s’efface pas. Il s’expose dans une symphonie mordorée époustouflant.
Sól tér sortna, sígr fold í mar,
hverfa af himni heiðar stjörnur;
geisar eimi ok aldrnari,
leikr hár hiti við himin sjalfan.
Völuspá, strophe 57.
Seul au sommet du Veinestinden, ma seule préoccupation est de capturer chaque nuance du crépuscule afin d’y déceler un quelconque dessein. Puis dans ma muette contemplation, tout me semble évident. L’opéra qui se joue devant mes yeux puise son dans le Ragnarök : “Le soleil s’obscurcit, la terre sombre dans la mer, Les luisantes étoiles vacillent dans le ciel ; Férocité nourrit les fumées et la flamme sacrée. Jusqu’à ce que le feu saute haut dans le ciel lui-même”. Ainsi est décrit la fin du monde dans la Prophétie de la voyante (Völuspá).
Mourant dans un feu étincelant, le soleil est fragile tandis que de son côté, la nuit sombre et froide nous rappelle la fragilité de l’équilibre régissant notre monde. Un infime dérèglement et le feu jaillit pour éteindre toute vie et faire table rase d’un passé abusé.C’est ainsi que meurent les hommes, les dieux et divinités mais que renait l’espoir d’un lendemain. Líf et Lífþrasir vivront par delà le Ragnarök, gardons espoir.
Descente par le Reinebringen
Réveil au paradis
Le soleil nous aura drapé de son linceul de lumière pour nous protéger des ténèbres. En effet, il ne faut pas oublier que sous ces latitudes le soleil de minuit ne laisse pas la place à l’obscurité la plus totale. Certes fin juillet, le soleil sous sous l’horizon. Cependant, Il y a encore toute une période où l’on peut expérimenter ce que l’on appelle la nuit blanche.
Sur le sommet, trois tentes gisent comme la carcasse d’un navire abandonné.
Je suis le premier à m’extirper de mon duvet. Comme un enfant le jour de Noël, je souhaiterais ne jamais quitter ce lieu. Pourtant l’orage annoncé dans l’après-midi, nous force à ne pas trainer. Nous replions le camps et, fidèle à Sylvain Tesson, nous ne laissons rien d’autre que la rumeur de nos histoires racontées.
666m, sommet du Diable
Quentin et moi sommes bien décidés à passer par le Reinebringen pour ne pas devoir prendre le même chemin au retour. En gros, il s’agit de monter le sommet éponyme de 666m avant de redescendre jusqu’au célèbre point de vue sur Reine. Nous savons, via des norvégiens rencontrés la veille, que ça passe mais que cela peut être un peu “aérien”.
Pour le coup, nous ne disons mot à Aurélie dont les passages aériens ne sont pas trop sa tasse de thé. Pourtant, arrivés au col, il faut bien lui avouer ! J’ai l’impression d’être Frodon au col de Caradhras devant annoncer à la Communauté que l’on passera par les Mines de la Moria. Aurélie n’est pas enchantée. Néanmoins, je suis super fier d’elle ! Elle prendra sur elle tout le long de la descente (scabreuse). Je peux vous dire que ce n’est pas rien !
Sur l’arête du Reinebringen
Au sommet, la récompense est totale. La brume atmosphérique de la veille s’est totalement évanouie. Ainsi, Reine se dévoile dans toute sa beauté : éclatante ! Malheureusement, ce moment de répit sera de courte durée. Il faut absolument entamer la descente. En effet, au loin de sombres nuages s’amoncellent et annoncent un déluge en devenir. Prudemment mais hâtivement, nous descendons vers le célèbre point de vue que tant et tant de touristes prennent en photo.
Sur le fil ! Frôlant le vide, profitant de la liberté !
Nous croisons deux randonneurs qui ont planté leur tente sur l’arête elle-même. “Mauvaise idée”, nous déclarent-ils à propos de leur “spot” avec leur café fumant qu’ils amènent devant leur visage endolori par le froid et le vent de la nuit. C’est là que nous comprenons que le sommet nous a protégé du vent piquant qui a soufflé sur les îles durant toute la nuit. Nous continuons notre route, faisons un rapide arrêt au point de vue et entamons la dernière descente.
Ultime descente
Les nuages dans le lointain se font pressant. Il est temps de jeter un dernier coup d’oeil sur la beauté éthérée de Moskenesøya et d’entamer la dernière descente. Celle-ci est encore plus défoncée qu’il y a deux ans. En effet, l’érosion du au trop nombreux passages ont rendu le chemin glissant et limite dangereux par temps humide. Malgré les mauvaises prévisions météos. Des personnes, parfois en simple sandale, extirpent leur carcasse épuisée vers le sommet. Quelle folie !
Les voitures sont (enfin) en vue. À peine a-t-on posé nos sacs qu’un orage éclate ! Il durera tout l’après-midi. C’est l’occasion rêvée pour retourner à Å manger ce qui est sans doute le meilleur Kannelbulle que j’ai pu manger. Accompagné d’un café bien chaud, je repense aux milliers d’images qui se bousculent dans ma tête. Je viens de vivre sans doute l’une des plus belles expériences de ma vie. Les Lofoten sont un paradis !
Parcours – Ascension du Veinestinden & Bivouac au sommet
Afin de préserver le milieu, les parcours sont désormais payants. Cela permet de financer le blog et de vous conscientiser à l’importance de prendre soin des chemins et infrastructures que vous empruntez ou utilisez. En effet, les parcours traversent souvent des zones sensibles et protégées.
Merci de votre compréhension
Très belles images ,ça me donne le goût d’aller connaître.