J’avais un terrible besoin de nature et cela faisait longtemps que je rêvais de faire la descente de la Vierre en packraft. Alors, j’ai pris ma journée et j’ai roulé 1h en direction du sud de l’Ardenne. Il avait neigé. C’était donc la journée parfaite pour couper de l’agitation quotidienne. La Vierre, cette rivière sauvage en Ardenne, ne m’aura pas déçu. Du coup, je te propose de m’accompagner pour cette microaventure en packraft.
La Vierre, une rivière sauvage en Ardenne
Prenant sa source dans la Forêt de Luchy près de Libramont, la Vierre se fraie un chemin à travers les profondes forêts d’Ardenne pour finalement se jeter dans la Semois près de Chiny. Sillonnant et déchirant les prairies, au coeur d’un agropastoralisme millénaire, la Vierre est une rivière extrêmement sauvage et un joyau de biodiversité. En effet, abrite de nombreux oiseaux comme les milans, grands corbeaux, cigognes noires, mais accueille également les dernières populations de moules perlières à l’ouest du Rhin !
C’est la raison pour laquelle, Natagora se mobilise depuis plusieurs années pour faire de la Vallée de la Vierre une réserve naturelle. Vous comprendrez donc que la navigation soit beaucoup plus réglementée que sur la Semois ou l’Ourthe. En effet, elle n’est autorisée à la navigation que du 1er octobre au 16 mars. Cette mesure est non seulement une question de protection de l’environnement mais aussi parce qu’à la belle saison, le niveau d’eau ne permet pas la navigation.
La Vierre, un veine de sauvagerie traversant les forêts d’Ardenne
Descente de la Vierre en packraft
En cette fin janvier 2019, j’étais habité par cette pulsion presque déraisonnée. Vous savez celle qui vous mène à vouloir jeter votre bureau par la fenêtre pour sortir et partir à l’aventure. D’un côté, j’avais donc cette irrépressible envie de prendre l’air. D’un autre côté, je dois bien vous avouer que la Vierre me faisaient de l’oeil depuis un petit temps. Et en adorateur de l’hiver, j’aspirais à faire cette descente de la Vierre en packraft sous la neige.
Or en cette fin janvier 2019, les chutes de neige sont assez capricieuses et changeantes. Du coup, dès que j’ai eu l’assurance d’une bonne couche de neige, j’ai pris congé et je suis parti en direction du sud de l’Ardenne. 12km de packraft sur la portion hivernale autorisée et retour à travers bois dans des paysages enchanteurs. Que demandez de plus ? Cela ne coute rien et cela vous file la patate pour deux semaines !
J’avais besoin d’un bon bol d’air. 1h de route, direction la Vierre, une petite rivière sauvage qui serpente vers la Semois. Des bottines, un sac et un packraft et c’est parti pour l’aventure. Nez au vent, pagaie dans la flotte !
De Martilly à Straimont, à travers bois
Je commence la descente de la Vierre en packraft à Martilly. Avec les 30cm de neige qui viennent de tomber, tout est recouvert et impossible de trouver l’aire d’embarquement. Je l’estime de manière un peu hasardeuse sous le pont. Caché par ce dernier, je gonfle le packraft, attache mon sac à l’avant de l’embarcation et m’élance sur la Vierre. À peine ai-je fait quelques centaines de mètres que je me fais déjà une idée très claire de la spécificité de cette rivière.
Technique, sinueuse, la Vierre demande une attention permanente. Elle est loin d’être de tout repos et se révèle rapidement comme LA rivière sauvage en Ardenne. Ses méandres ne cessent de se succéder en même temps que branches et rochers. Après avoir traversé les prairies de Martilly, la rivière s’engouffre dans une vallée encaissée et forestière, magnifique ! Elle n’en sort d’ailleurs qu’à l’approche du petite village de Straimont…
Limite oppressante, les arbres semblent former un tunnel dans laquelle la Vierre s’engouffre à corps perdu.
Le courant hivernal de la rivière m’emmène à toute vitesse à travers le petit village. Alors que je rentre à nouveau dans les bois, un tronc entier barre le passage. Le courant m’y colle. Instinctivement, je plonge mes mains dans l’eau pour faire passer le packraft ! Directement après, je dois négocier des passages où des branches émergent comme des mains décharnés du fond de la rivière.
Branches, rochers, méandres serrés, la Vierre se révèle instantanément comme une véritable rivière sauvage, libérée de toute contrainte humaine…
De Straimont à Suxy, un petit air de Scandinavie
Lorsque la rivière s’extirpe enfin de l’oppression forestière. La vallée s’élargit. Son manteau d’albâtre emporte mon esprit en Scandinavie. Cette vallée n’est qu’à quelques kilomètres d’un village. Pourtant, je me plais à m’imaginer au milieu de nulle part, isolé et oublié de tous. Je sais pertinemment que la civilisation n’est pas loin. Malgré cela, la force et la beauté des éléments stimulent mon imagination. Ces dernières oasis de nature deviennent des théâtres parfaits pour vivre des microaventures inoubliables. J’oublie alors les orteils gelés, le pantalon qui commence à percer, je ne pense plus qu’à cette rivière serpentant dans cette vallée enneigée… Je suis en Ardenne, ou en Sibérie, ou en Scandinavie ? Qu’importe, je vis !
Et au milieu coule une rivière… C’est simple, c’est magnifique. Aujourd’hui, je suis le forban de la Vierre !
Cela peut paraître stupide de passer une journée dans l’humidité et le froid. Pourtant, je n’ai pas regretté un seul instant d’avoir pris mon barda pour explorer cette partie de l’Ardenne encore inconnue. Et ce n’est pas ce barrage de castor près de l’arrivée qui me fera changé d’avis. En effet, les castors m’avaient concocté un bel ouvrage m’obligeant à accoster et trainer le packraft sur quelques dizaines de mètres… C’est donc encore plus humide que je suis arrivé à Suxy pour entamer mon retour à pied.
Randonnée de Suxy à Martilly
Retour les pieds dans la neige
Lorsque j’accoste juste à la sortie de Suxy, je me dépêche de remettre mon packraft dans le sac. La journée est déjà bien avancée et je n’ai pas envie de finir à la frontale. Après avoir traversé le village, je jette un dernier regard sur la Vierre avant de lui tourner le dos et de m’engouffrer dans la forêt. Cependant, l’importante couche de neige (jusqu’à 50cm à certains endroits) et le poids du sac me ralentissent beaucoup plus que ce que je ne pensais.
Qu’importe ! La neige a la faculté de transformer les paysages détachant la silhouette d’un arbre décharné de la forêt, le ciel sombre de l’horizon ou la veine noire d’une rivière des champs parés de blanc. Elle enveloppe notre imagination de féérie. C’est la raison pour laquelle nous conservons tous cet émerveillement quasi enfantin à son sujet. Dans ces paysages enneigées, le silence s’impose. La forêt se fait l’écho d’un imaginaire infini, le nôtre. Et quand s’invite la solitude à cette gloire glacée, je me délecte d’un nectar plus pur que l’hydromel, la félicité !
Tout ce dont je suis coupable est pardonné quand tombe la neige. Je me sens puissant. Dans les villes, je me sens faible et étiolé, mais ici dans les champs, dans la neige, je suis comme un animal – incapable de contrôler mes émotions, mes bonheurs et mes fureurs, mais libre d’aimer la neige, de me tenir les bras grands ouverts, comme pour l’inviter à descendre, la regardant glisser et déferler à l’oblique, (…)
– Rick Bass, Winter
Martilly en vue !
Alors que j’arrive à proximité de Straimont, j’aborde la dernière vallée avant de filer définitivement vers Martilly. Le ciel n’attend qu’un prétexte pour faire tomber davantage de neige. Pourtant, il se retient et laisse tout le monde retenir son souffle. En réalité, alors que je quitte cette dernière parenthèse scandinave, je sens une présence… Loin d’être une ombre, il s’agit plutôt du soleil qui prend son courage à deux mains pour déchirer le ciel avant de tirer sa révérence.
Les cimes des arbres se sont alors instantanément paré d’une douce et magnifique couleur cuivrée. Les derniers kilomètes se firent alors dans une ambiance aussi étrange que magnifique. Sur cette ligne de crête entre les deux villages, je pouvais, d’un côté, admirer les pâles couleurs dorées d’un soleil mourant et, d’un autre, l’ombre de la nuit allongeant son emprise, l’alpha et l’omega d’un magnifique journée !
Je vagabondais entre le jour et la nuit. Collectant les souvenirs glacés d’une journée en pleine nature : Simple et sauvage.
Parcours – Descente de la Vierre en Packraft
PLAN IGN
PHOTOS AERIENNES / IGN
OPEN STREET MAP
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Informations techniques
Descente de la Vierre en packraft
Informations complémentaires
Départ
Le départ se fait à l'aire d'embarcation à côté du pont à la sortie du village en direction de Menugoutte.
Un parking est à disposition à côté du pont.
Difficulté
La rivière est relativement complexe dans son approche à cause des nombreuses branches et obstacles qui jalonnent le parcours.
La retour par les chemins ne représentent aucune difficulté particulière.
Parcours
Sur la Vierre, il n'y a pas de confusion possible.
Le parcours de randonnée n'est pas balisé.
Matériel
Il n'y a pas de location de kayak. La seule possibilité d'effectuer la descente de la Vierre (du 1er octobre au 16 mars) est de disposer de son propre matériel.