La Bouillonnante, c’est LA référence du Trail en Belgique : des paysages magnifiques, du dénivelé, des single tracks, des passages techniques, deux traversée de la Semois, des échelles… bref un condensé de nature associé à une organisation rodée garante d’une ambiance festive ! Cette année, j’avais prévu de m’aligner sur la grande distance pourtant ce fut incertain jusqu’au dernier moment…
La fatigue
Lorsque début janvier j’ai établi mon calendrier 2014, la Bouillonnante figurait comme une étape cruciale avant la Traversée du Trail Verbier-St-Bernard et ses 61km et 4000m de D+. Il me semblait important de fixer un trail longue distance pour valider un certain nombre de points comme la longue distance couplée au dénivelé.
Cependant, j’avais clairement sous estimé le poids de la fatigue que j’accumulerais au Maroc. Bien que peu physique, le 4L Trophy était arrassant sur d’autres points : manque de sommeil, stress et concentration. À tel point qu’une fois rentré, j’ai chopé une salle bronchite qui n’a fait qu’accentuer mon état. Une fois rétabli, j’ai directement continué mon plan d’entraînement pour la Bouillonnante et indirectement pour Verbier sans pour autant avoir effacé ma fatigue. Le Trail des Sauvages de début avril constituait, quant à lui, une sortie longue validant ma préparation à un mois de l’échéance de Bouillon. Là encore, je faisais état dans mon CR d’un cardio fort haut et d’un gros coup de mou sur les 10 dernières km résultante plus que vraisemblablement de…. ma fatigue (et de ma non prise de malto les trois jours avant l’épreuve).
La semaine précédent la Bouillonnante, cette fatigue s’est même invitée au quotidien alors que j’étais au repos (je fais toujours une coupure d’une semaine précédent un gros objectif). Mes followers sur Twitter ou Facebook ont d’ailleurs dû subir mes petits statuts de déprimés parlant de la possibilité de me rabattre sur le 35km plutôt que le 56. En effet, cette année l’organisation apportait un nouveau parcours de 35km que l’on choisissait en cours de parcours. C’est d’ailleurs avec cet esprit là que je me couche la veille au soir : je vais courir le 35 km.
Cool, mec ! C’est qu’un entraînement…
Samedi matin, après un morceau de Gatosport, direction les Ardennes et cette magnifique région de Bouillon. Je me sens stressé… En fait, depuis le début de la semaine, je stresse à MORT. Je ne sais même pas pourquoi puisque 35km j’ai l’ai déjà fait sans stresse et sans soucis. Ma copine me le répète aussi : NO STRESS. Pourtant rien à faire et mon mal de gorge au lever n’arrange rien…
Arrivé à Bouillon, je file directement chercher mon dossard. Je retrouve Ludo, croise Cowmic, salue Jean-Pol du Trail de l’Orneau. Ça fait plaisir de voir des têtes connues… En même temps, difficile de ne pas croiser des têtes connues sur ce Trail. Il fait magnifique. Grand soleil. Ça sent la journée parfaite sur les sentiers ! Rapidement, je gagne la cours du château pour attendre le briefing et ENFIN démarrer sur les sentiers. Vincent nous rejoint pour briefing qui me semble toujours bien trop long :p… Impatience, impatience…
La musique d’Era retentit suivi du coup de feu ! On s’engouffre alors dans les entrailles du château de Godefroid pour en ressortir au son des percussions. Après un rapide tour dans la ville, on longe la Semois sur un large sentier. Je taille la causette avec Ludo tandis que Vincent nous précède de peu. Le millier de coureurs (départ commun du 35 et du 56km) provoque rapidement des ralentissements à l’approche du premier mur. On discute, on s’amuse, on rigole, bref on profite déjà bien de cette journée. Au sommet, je décide de couper quelques lacets. Ludo vole sur sa caisse à deux reprises… Ça glisse pas mal. Il fait sec mais la pente est sacrément acérée.
Il s’ensuit une longue côte jusqu’à Corbion que l’on traverse pour atteindre les hauteurs de Poupehan. Après avoir rattrapé Ludo, je le perd à nouveau et me fait rattraper par Vincent et sa clique qui met l’ambiance dans le peloton un peu avant les Crêtes de Frahan. Ce passage, je pense l’avoir déjà dit et redit sur ce blog est sans doute mon préféré. Et même si ça ralentit pas mal dans les rochers, la suite en single track jusque Frahan est terrible.
Cette première partie jusqu’au premier ravito est loin d’être intensive. Tout se passe bien. Le cardio est bas, les jambes répondent bien et le moral est là ! C’est le principal. Depuis le début de la course, je veille à bien m’alimenter et m’hydrater. À ce niveau là, c’est donc également une grosse amélioration par rapport au Trail des Sauvages où je me suis senti en difficulté dès le 10e kilomètre. J’avoue que la cure de maltodextrine durant les trois jours précédents est véritablement efficace. Plus jamais, je ne ferai l’erreur de manquer à cette cure. Plus jamais !
À partir de là, j’entame une partie du parcours inédite pour moi puisque le 24km n’y passe pas. Après un single track le long de la Semois, on monte vers Rochehaut puis on redescend à nouveau pour entamer une ascension de 200m de D+ sur près de 3km. J’en profite pour m’alimenter. A ce moment là, tout est au beau fixe : cardio, jambes, alimentation… Je profite simplement de la magie des bois !
On approche déjà les 18 kilomètres et arrive le moment fatidique du choix de la distance 35 ou 56? J’étais parti pour 35 mais mon orgueil pour 56. À ce moment-là, tout est parfait dans ma gestion de course. Je suis juste un peu plus lent que prévu mais je m’en fous ! Au diable la raison, il fait MAGNIFIQUE et puis courir, c’est juste mettre un pied devant l’autre ! J’oblique à gauche sur le 56km ! Je prends mon téléphone pour prévenir ma copine qui me suit sur le Trail. Je tiens quand même à la prévenir qu’au lieu de 4h30 c’est près du double qu’elle va devoir poireauter !
Les kilomètres suivants sont parfaits : léger faux-plats descendants, bonne récup, ça déroule, les paysages sont magnifiques. J’en prends plein les yeux durant 5 bornes. On traverse Cornimont :
Dans la descente vers Mouzaive, je me fais rattraper par Vincent et son comparse que j’ai perdus de vue dans la descente vers Frahan. On tape la causette dans cette descente bien technique suivie d’une bonne descente roulante à travers bois qui nous amènera jusqu’au ravito. On est à 30 km. Je suis encore super bien. Il est loin mon état lamentable du Trail des Sauvages. Ici, pas de douleurs dans les jambes, pas de fatigue, ça roule à merveille ! Je pourrais courir des heures et des heures… ça tombe bien, c’est ce qui m’attend ^^ Je me ravitaille et c’est reparti…
Il reste encore une section de 13 km avant le retour à Frahan. Cette partie ne m’a pas laissé un grand souvenir. C’était une succession de sous-bois relativement roulant même si on se prenait 500 de D+ sur la portion. J’avoue qu’à partir du 37e, j’ai commencé à sérieusement décompter les km plus par monotonie que par fatigue. Heureusement, à partir du 40e km, le sentier à flanc de colline a relevé mon attention de plusieurs crans pour éviter une chute et une dégringolade de plusieurs mètres. Il y a rien à faire j’adore ces single track à flanc bien casse-pipe 😀 Mais ici, après 40 bornes, il faut vraiment être très très prudent. Après un passage à travers pré où le soleil me donne vraiment chaud pour la 1ere fois de la journée, je me retrouve à nouveau au ravito à Frahan.
La fatigue commence à poindre très clairement. Je me suis moins bien ravitaillé durant les 10 derniers km et je commence à le sentir très fort tant mentalement que physiquement ! Je me force à bien manger avant d’attaquer The Wall, une côte de 160 D+ en un peu plus de 700m qui fait l’objet d’un classement particuliers. C’est dans cette côte que ma copine (et photographe du jour) m’attend. Cette côte m’a littéralement cassé. J’arrive près d’elle dans un état second. J’avoue que je n’ai plus une conscience à 100% efficace. Alors que 1km avant, j’étais relativement bien. Maintenant, ça ne va plus du tout. Je suis dans un mode quasi mécanique où je me limite à mettre un pied devant l’autre.
Je me force à effacer de mon esprit cette souffrance car la dernière partie est cassante à souhait et je devrai encore y déployer attention et rythme. En effet, à peine a-ton repris son souffle qu’on attaque le parcours des échelles :
Photos prises en août 2013
Je reste concentré car comme la pancarte le dit : c’est un passage dangereux. La moindre erreur et on peut se faire bien mal. Mon rythme de course pâtit de cette baisse de régime. Je peine vraiment dans le long single track longeant à nouveau la Semois et encore plus dans la longue côte qui nous amène au panorama donnant sur la Tombeau du Géant. Heureusement, un ravito y est installé, je prends du coca. Cela me revigore à moins que ce ne soit le passage à gué de la Semois… Toujours est-il que je gravis le tombeau avec une énergie retrouvée. On traverse une fois encore la rivière et là je sais qu’il ne reste plus qu’à monter jusqu’au Belvédère pour terminer par une descente vers Bouillon.
A partir de là, je sais que je serai finisher de cette 9e Bouillonnante. Le moral est à nouveau à bloque, les jambes aussi malgré les courbatures. Je rattrape quelques personnes dans la dernière côte. Je passe le photographe officiel. Un groupe de percussion joue au milieu des bois et marque le dernier kilomètre. Je descends. La pente est vraiment bien costaude, mes quadris sont morts mais pas de crampes !
Et puis, il y a ce sentiment indescriptible une fois revenu à la Civilisation… En bas du château, il ne reste plus qu’à grimper pour le rejoindre. Les gens vous encouragent et crient votre nom (inscrit sur le dossard), ils vous exhortent. Vous sortez tout ! Vous finissez en courant et traversez une véritable haie d’honneur ! Les larmes vous montent aux yeux ! La ligne est franchie ! Ca y est !!! Vous l’avez fait !! Je l’ai fait !! I DID IT !
Et comble de cette victoire sur soi-même, l’esprit trail n’est jamais loin ! À peine avais-je fait quelques pas que Eric Brossard, un des meilleurs traileurs belges, vient me féliciter ! Je ne le savais pas encore mais il était 2e en 5h31… Puis, c’est autour de mon ancien prof de gym, de Jean-Pol, Olivier, Vincent, Ludo… On ne demande pas notre temps… On s’en fout. On a couru le même sentier, on a eut les mêmes plaisirs, les mêmes craintes et surtout la même hargne et ça suffit amplement !
Je termine 320e en 8h15,19 (temps réel : 8h12,55).
Après une semaine de grosse fatigue et un rhume, je ne regrette pas de m’être challengé sur la longue distance à mon aise et sans me mettre dans le rouge. Il faut dire que cette Bouillonnante est un entraînement pour Verbier en juillet. Et sur ce point, elle valide quelques unes de mes craintes comme la distance couplée au dénivelé mais aussi l’absence de crampes, d’ampoules,… La partie n’est évidemment pas gagnée et il y a encore de l’entraînement nécessaire pour être au top en juillet mais ça va le faire.
La richesse et la beauté de ce Trail a fait passer le temps très vite. Je me voyais déjà en train devoir compter les moutons sur certaines sections et bien, il n’en n’est rien ! On ne s’embête pas un instant. Même la partie plus “banale” reste super dynamique par rapport aux trails que j’ai pu faire précédemment.
Mon move :
Et SURTOUT un tout grand merci à l’ORGA et à tous les bénévoles qui font chaque année un gros travail pour rendre cette journée INOUBLIABLE !!
Bravo Julien ! Ca m’a rappellé de bons souvenirs ! Un parcours exigeant pas facile à gérer avec la fatigue!
Merci beaucoup à toi ! Effectivement, c’est pas facile mais tellement beau qu’on l’oublie vite cette fatigue 😉
Quelle journée de fou ! Super CR Julien ! Certains passages sont mémorables et l’arrivée épique avec tous ces gens ! Encore félicitations et merci pour ces quelques km passés ensemble, toi, Vincent… C’était fun !
Attention tout de même à ne pas trop abuser de ma somptueuse technique de descendeur ! MOUARF !
Joli CR Julien ! Belle description de ta course qui donne envie d’y participer pour une prochaine édition. La distance ne me fait pas “trop” peur, seuls les délais impartis pour boucler le parcours me font reculer. D’ailleurs, j’estime que l’instauration de plus en plus fréquente de tels délais sur les trails risque à terme de pénaliser les finishers (voir l’esprit de telles courses) même si je comprends ces décisions des organisateurs confrontés à des impératifs toujours plus nombreux aussi. Ces contraintes chronométriques renforcent encore mon admiration quant à ta performance à Bouillon. Chapeau bas Monsieur !
Merci beaucoup !! Ne t’en fais pas pour les délais. Ils ont été rallongé près de 7h15 pour les 43 premiers km. Donc c’est largement faisable et cette année quasi tout le monde a été classé 😉
Encore bravo camarade, super compte-rendu.
Je savais que tu en étais capable, tu as bien fait de surmonter le doute.
BIG BIG UP !!!
MERCI 😀
Bravo à toi également ! Finir dans le dur n’est jamais évident !!
A très vite !
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